Le burnout qui signifie littéralement combustion totale, est nommé également épuisement professionnel. L’étymologie du terme « épuisement » renvoie au fait de vider de l’eau d’un puit alors que l’on en a déjà trop tiré, et évoque des ressources physiques, mentales et émotionnelles qui se tarissent.
En 1768, le docteur Tissot décrivait déjà les méfaits de l’acharnement au travail sur la santé. En 1959, le psychiatre français Claude Veil pose le concept d’épuisement au travail. Et c’est au psychanalyste américain Herbert J. Freudenberger, que l’on doit en 1974, l’attribution des termes de « Burn-Out Syndrome ». Il décrit ce syndrome comme le fait de s’user ou d’être épuisé après avoir sollicité de soi trop d’énergies ou de ressources. Il définit ce syndrome comme la perte de motivation d’une personne pour son travail, surtout quand sa forte implication n’a pas produit les effets escomptés. Dans sa conceptualisation, les facteurs individuels se voient attribuer un rôle important dans le développement du syndrome d’épuisement professionnel, car ce sont des individus engagés et dévoués à une cause qui sont frappés. A partir 1976, Christina Maslach chercheuse en psychologie sociale, travaille à ces premiers travaux sur l’épuisement professionnel. Son champ de recherche la mènera vers une prise en compte des facteurs environnementaux.
Le burnout ou épuisement professionnel se réfère à des éléments bien spécifiques et ne peut être confondu avec une insatisfaction passagère, avec une grande démotivation ou même avec la dépression.
Définition
Nous retiendrons que selon Christine Maslach et Michael P. Leither (2011), le burnout désigne un état psychologique, émotionnel et physiologique résultant de l’accumulation de stresseurs professionnels variés. Contrairement à une réaction banale de stress qui va être ponctuelle et immédiate, le burnout trouve ses racines dans le temps ; c’est-à-dire qu’il se manifeste en réponse à une quantité de stresseurs qui se répètent continuellement, s’inscrivent dans la durée, et finissent par user et épuiser l’individu.
Trois volets forment le syndrome d’épuisement professionnel.
L’épuisement émotionnel
Cette première phase se spécifie par un état de fatigue mentale, psychologique caractérisé par une absence quasi-totale d’énergie émotionnelle qui se répercute sur la vitalité physique de l’individu. Cet épuisement émotionnel se concrétise par une fatigue effective au travail, par des difficultés relationnelles et également parfois par des explosions émotionnelles, ainsi que des difficultés cognitives comme la concentration. Cet épuisement se heurte à l’incapacité à exprimer toute émotion. Incapacité dont on peut trouver l’origine dans des normes sociales, sociétales qui œuvre pour des comportements de contrôle, et pour la non expression des faiblesses. Ce qui va engendrer un dénie et ainsi cet épuisement émotionnel peut prendre l’aspect d’une froideur, d’une distanciation à l’autre.
La déshumanisation de la relation à l’autre
Cette deuxième phase qui a pris racine au stade précédent nous donne à voir un état de dépersonnalisation caractérisé par une attitude négative et détachée, parfois du cynisme comme une dernière tentative de protection contre l’épuisement et la déception qui en découle. Cet état de déshumanisation a de véritables conséquences sur les personnes avec qui l’individu interagit dans son contexte professionnel, car selon Michel Delbrouck (2008) l’autre peut être chosifié, vu comme un objet. Tout comme l’ensemble de ce processus, cette déshumanisation s’installe progressivement et à l’insu même de la personne.
Le sentiment d’échec professionnel ou la diminution de l’accomplissement personnel
Cette troisième phase comprend une diminution du sens de l’accomplissement et de la réalisation de soi, qui a pour conséquence un sentiment d’échec professionnel. En effet, cette diminution de l’accomplissement personnel peut se vivre comme un sentiment d’inefficacité, et met en exergue un sentiment de frustration et de perte de sens. Ce sentiment d’échec engendrera une dévalorisation de soi, de la démotivation mais également de la culpabilité.
Les conséquences du burnout
Les conséquences peuvent être diverses : absentéisme, fuite du travail, projet de changement de métier ou à l’inverse une hyperactivité réactionnelle mais avec une rentabilité et une efficacité diminuée (Michel Delbrouck, 2008).
Il semblerait qu’à ce stade la personne en burnout ait perdu le sentiment d’efficacité personnelle au sens où l’entend Albert Bandura (1980)à savoir la croyance qu’à une personne sur sa capacité d’agir de façon à atteindre certains buts. Cet aspect de la confiance en soi est une base importante de la motivation à agir et de la persévérance vers des buts, car le niveau d’effort investi peut être vu comme proportionnel aux résultats attendus. Cette composante de diminution du sens d’accomplissement représente la dimension d’ »autoévaluation » du burnout.
Une des caractéristiques particulières du burnout est que ce syndrome se propage graduellement, Michel Delbrouck parle d’un « trépied de phases progressivement évolutives » (Delbrouck, 2008, p.29). Même s’il donne l’impression de survenir brutalement et qu’il entraîne les individus dans une spirale descendante dont il est difficile de sortir. Nous voyons ici que ce syndrome à trois dimensions donne la réplique à un stress émotionnel chronique et répétitif.
Le burnout révèle un malaise existentiel et social. A celui qui le subit, il pose la question du sens de la vie.
Isabelle Marchal
Psychologue à Amiens